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MÉMOIRE DU TEMPS QUI PASSE

 

par Altay Dagistan

 

Pendant que vous lisez ces mots, le temps passe et quelque part, quelqu’un crée des souvenirs. Comme le romancier espagnol Carlos Ruiz Zafón le dit:“Nous sommes ce que nous nous souvenons”.

 

Introduction

Ce texte est basé sur le temps qui passe, sur la mémoire et sur la réelle expérience que nous en avons. Dans mon écrit, plutôt que d’essayer d’expliquer que le temps est un seul contenu (futur=présent=passé), j’ai choisi de rechercher ce que le temps signifie pour différentes personnes, cultures et disciplines et bien sûr, pour moi. Nous pouvons comparer tous ces points de vue entre eux pour voir la notion de temps dans un contexte plus large et ainsi en profiter pour la compréhension individuelle.

J’ai fait des recherches sur le “temps” pour deux raisons personnelles :

L’une d’elles est que, étant de nationalité turque, né à Istanbul, j’ai été élevé par mes parents comme un garçon musulman qui croit en Dieu, au paradis et à l’enfer, aux anges et au diable. J’étais absolument certain d’être un être éternel. Un jour, je mourrai et après, mon âme continuera à vivre au paradis. Cependant, en grandissant, je suis devenu plus conscient de moi-même. J’ai commencé à m’interroger sur les croyances religieuses et je me suis rendu compte que la vie éternelle n’était pas prouvée ; en effet, à part des écrits dans certains livres (comme la Bible ou le Coran), on en a aucune preuve.
En outre, je me suis demandé comment pouvait fonctionner
le cerveau, ce qui m’a amené à me poser de nombreuses questions sur l’existence. En effet, le cerveau est l’organe qui fait de nous ce que nous sommes. Sans le cerveau, même s’il ne fonctionne pas bien, nous ne sommes rien. Alors que le système complet de l’espace fonctionne parfaitement comme une horloge, comment pourrait-on croire à des phénomènes relevant de la “magie”? Sans aucune promesse de la vie éternelle, le temps est devenu pour nous tous, la chose la plus importante.

La deuxième raison est que, avec la crainte de devenir inexistant un jour, je pense de plus en plus à mes souvenirs. Plus les années passent, plus j’ai des souvenirs qui me permettent de me rendre compte du temps qui passe. Ces souvenirs me font penser à ma vie et me rendent nostalgique. Mes souvenirs me donnent l’envie et la curiosité de comprendre la réalité du temps. Parce qu’il est impossible de répondre à cette question d’une seule façon, j’ai fait des recherches sur les multiples manières de comprendre“ce qui
se passe”.

Nous explorerons le concept du temps qui passe en ce qui concerne la science, les cultures et les religions, l’art et les valeurs sociales. Plutôt que de diviser chaque point de vue par des lignes très nettes, j’ai choisi de les disperser, car je crois que dans le concept du temps, tous les aspects fonctionnent ensemble et sont tous connectés. En même temps, il est aussi important de comprendre chaque aspect individuellement. Les premiers phénomènes auxquels nous devons penser, sont le changement et la mémoire. Ils constituent la base du temps qui passe. Ensuite, nous verrons la connexion entre la mémoire, le temps qui passe et le matériel (les objets). Les humains sont des êtres sociaux, donc les objets fabriqués et/ou utilisés par l’homme détiennent des informations sur le temps qui passe. Inévitablement, il encourage les formes de communication. Puisqu’avec le temps tout change, des évolutions se produisent. La Communication évolue en même temps que les êtres humains. Nous communiquons par de nombreuses façons, y compris par l’art.

L’art est une des plus anciennes méthodes de communication. Beaucoup de créations des peuples anciens comme le peuple Égyptien, de la Grèce Antique, des Mayas, ont survécu jusqu’à aujourd’hui. Par exemple, le dieu de la moisson “Kronus” (aussi connu sous le nom de Chronos, dieu du temps) est la personnification du temps dans la mythologie Grecque. Kronus surveille le temps et s’occupe des saisons. Le temps consume tout et d’après la mythologie Kronus dévore ses enfants. On peut voir ici une métaphore sur la nature du temps. Aujourd’hui, nous pouvons observer ce dieu sous la forme de sculptures anciennes. Il est souvent représenté avec une barbe, tenant une faucille et semblant sage.

Comme nous, ces civilisations pensaient également au temps. Ils avaient tous leur idée sur le temps et ils avaient tous leurs méthodes pour le mesurer. Depuis la création de l’homme, les peuples de culture et de religions différentes ont leurs points de vue sur la notion de temps. Ces peuples ont parfois la même vision du temps et parfois des visions qui divergent. Par exemple, pour certains, le temps est infini alors que pour d’autres, le temps a un début et une fin. L’homme est le seul être vivant qui a conscience du temps qui passe. Il a donc construit des horloges et organisé sa façon de vivre en fonction du temps. Aujourd’hui, grâce à la technologie, il a une meilleure compréhension du temps qui passe. Il est capable de mesurer le temps avec une extrême précision en observant les électrons.

Cette précision pour mesurer le temps a permis à l’homme de comprendre par l’expérience, que le passage du temps pouvait être différent d’un individu à un autre. La raison de cette différence est la vitesse et la distance. Par exemple, la vision met du temps à se produire car la lumière a une certaine vitesse. Pour observer le passé, nous pouvons tout simplement regarder le ciel nocturne. Quand nous regardons le ciel, nous le voyons tel qu’il était dans le passé car la lumière met un certain temps pour parvenir jusqu’à la Terre.
Comme les étoiles que nous observons dans le ciel nocturne, nous vivons le passé constamment parce que le présent prend un temps infime pour lui-même se transformer en passé. Plus longtemps nous vivons, plus de souvenirs nous avons. Sachant que notre temps est limité, nous regardons notre passé et nous pensons à l’avenir. Nous essayons de faire nos choix pour avoir le meilleur avenir possible. Chaque choix définit les prochains et met nos vies sur un itinéraire différent. Nous nous déplaçons constamment vers un demain et le demain se déplace à la même vitesse et en même temps que nous. Hier reste dans
le passé comme un souvenir. À un moment donné dans notre vie, nous remarquons tous que le temps passe vite. Depuis que nous sommes dans la société industrielle, la ligne entre le futur et le passé est de moins en moins visible car vivre dans la routine a minimisé les changements sociaux. Je crois qu’en réfléchissant plus sur le temps, en augmentant nos connaissances et en élargissant notre vision du temps qui passe, nous pouvons nous faire une meilleure idée du monde, améliorer notre qualité de vie et faire un meilleur usage de notre temps.

Avant que vous ne commenciez à lire les autres parties de ce mémoire, je voudrais préciser mon point de vue sur le concept du temps. Le temps est l’existence même. Je ne regarde pas le concept du temps seulement comme un processus ou une mesure. Il fait partie de la nature universelle.
Il croît comme un arbre. Ce qui s’est passé jusqu’à maintenant est ce qui nous fait être. Même si je trouve la relativité générale très intéressante, je crois davantage au point de vue du temps newtonien. “Le temps absolu” est le temps qui bouge constamment, en gardant la même vitesse, indépendamment des autres choses. Le temps est un concept linéaire, sans début ni fin. Le sablier peut être la représentation visuelle de mon point de vue. Comme l’a déclaré “Isaac Newton”, nous ne sommes pas capables de percevoir le temps absolu. En fait, nous nous rendons compte du passage du temps grâce aux mouvements et aux changements (le soleil par exemple).
Nous sommes des êtres complexes et pour nous, la perception du passage du temps est bien plus que le seul mouvement
du soleil.

Les phénomènes ordinaires comme le ruissellement de l’eau sur la chaussée ou le mouvement des feuilles dans les arbres nous tiennent au courant que le temps passe. Ils nous donnent des informations sur les périodes courtes du temps. Pour suivre les périodes plus longues, nous regardons les événements individuels du passé. Au cours des dernières années, je me suis plus particulièrement intéressé à la comparaison de mon passé à mon présent. Je pense à mon enfance. Mon enfance est très importante pour comprendre le temps parce qu’elle est le plus grand contraste entre mon passé et mon présent. Contrairement aux gens qui disent que nous avons la même personnalité de notre enfance à l’âge adulte, je crois personnellement que nos mentalités changent complètement tout au long de notre vie. Nous créons une version plus perfectionnée de nous. Aujourd’hui, il ne reste rien de la maison où j’avais passé mon enfance. Cette maison, qui tient une place importante dans mes souvenirs. Ma ville natale s’est transformée de façon à ce qu’elle soit méconnaissable.
Je les envie, ces peuples qui trouvent la même vieille maison, la même rue et les mêmes voisins quand ils vont rendre visite
à leur parent.

Je considère que mon enfance se termine à l’âge de mes 6 ans. L’endroit où j’habitais jusqu’à cet âge (l’année 1994) était chez moi. Par la suite, deux événements importants se produisent. Le premier : ma grand-mère décède et ma famille décide de faire un marché avec un entrepreneur. Elle échange la maison familiale contre un appartement. La maison est détruite et remplacée par un nouvel immeuble. Quelques années plus tard, mes parents vendent l’appartement. Le second évènement est l’école, je n’ai jamais aimé y aller jusqu’au dernier jour de lycée. Pour moi, l’école était un endroit obligatoire où je n’étais pas libre. J’étais obligé de dépenser la majorité de mon temps là-bas. Or je ne me sentais pas libre, par conséquent je n’étais plus un enfant. A partir de là, le temps a commencé à passer beaucoup plus vite et ma situation qui était jusque là stable est devenu plus instable à cause de changements constants.
Comme je l’ai mentionné avant, nous ne sommes pas capables de suivre le temps absolu. Nous nous rendons compte de son passage grâce aux changements et aux mouvements. Une grande partie de cela est visuelle. Je remets en question
la visualisation du passage du temps par le média en utilisant le graphisme. Le graphisme connait déjà le temps. Il est utilisé dans les calendriers, les horloges et montres, programmes ou dans les médiums qui gardent en mémoire le temps comme les albums de photos, les cartes postales, les rapports annuels, les journaux et les livres. Je peux manipuler les objets du passé en vue des médiums variés pour raconter des histoires. Le fait de ressusciter les vieilles photos, cartes postales, journaux avec des visuels nouveaux rappelle au spectateur qu’un jour le passé se transformera en aujourd’hui. Bien que ces objets soient temporaires, leurs effets sont permanents.
L’univers fonctionne de la manière suivante : du plus simple au plus complexe. Les choses comme les mémoires se développent comme une construction pour devenir des versions plus complexes que leurs bases. La forme actuelle d’un être est définie par l’histoire de sa vie. L’avenir est le temps qui passe. La différence entre l’avenir et le passé est que nous n’avons pas des mémoires de l’avenir, comme nous les avons du passé. Les mémoires nous montrent que le temps est passé. Comme l’avenir devient le présent, on crée les mémoires et on les envoie au passé. En fait, sans les mémoires du temps qui passe, on ne pourrait pas déterminer ni comprendre que le temps est passé. Pour comprendre les changements de notre monde, nous comparons les mémoires d’avant aux mémoires d’après. Le monde est en constante évolution depuis 4.600 millions d’années(1). Les océans se transforment en montagnes, les montagnes en mers, les roches en rivières. Mais ces changements se font si lentement que nous ne sommes pas en mesure de le remarquer durant notre vie.
Puisque le changement est la clé du passage du temps, je me permets d’ajouter à mon sujet, la mémoire et les souvenirs.
Les souvenirs sont l’expérience humaine du temps.

Quand j’étais petit, j’avais pour habitude de regarder et de réfléchir sur les objets que les gens laissaient chez nous. Ces objets me rendaient souvent nostalgique. La mémoire de ces personnes était ancrée dans ces objets alors qu’eux n’étaient plus là. Ces objets me rappelaient ces gens avec qui j’ai ou j’avais eu des émotions fortes. Ce qui pouvait être pour moi parfois très difficile à gérer. Il m’était parfois tellement insupportable de garder ces objets que je devais les jeter. C’est seulement vers 25 ans que j’ai commencé à avoir de plus en plus la force d’accepter les souvenirs, les preuves physiques des gens qui passent dans ma vie. A cette époque, j’ai découvert que l’on oubliait plus facilement les gens sans les souvenirs physiques. Les objets laissés par d’autres personnes sont des rappels forts.

Puisque la durée de nos vies est si courte par rapport au monde, nous avions besoin de moyens pour transférer nos connaissances aux générations à venir. Nous avons donc appris à partager nos connaissances. Sans le transfert de la mémoire à la matière, toutes nos connaissances, auraient disparu avec chaque individu qui meurt. Maintenant, le temps qui passe n’est plus une menace à la mémoire et à la connaissance. L’histoire, les connaissances et les pensées des gens qui périront à cause du temps qui passe, sont maintenant stockées dans
les médias tels que les livres, les disques et les photos. Grâce à ces médias nous avons pu transférer ce que nous avons accompli jusqu’à présent pour les générations à venir.
Cela permet au travail collectif d’être libéré des limites du temps de toutes les personnes qui vivent et qui ont déjà vécu dans le monde. C’est l’évolution de l’information elle-même.
Le changement est essentiel pour la notion de temps.
Le changement est ce qui rend possible au “moment” de passer. Le plus grand changement pour l’homme est l’évolution humaine. Avant, je croyais que les humains ne venaient pas de ce monde et n’étaient pas une partie de la nature. Parce qu’à notre époque, nous ne sommes pas physiquement capables de vivre dans la nature comme les animaux. Nos peaux et nos os sont fragiles, nous ne sommes pas très musclés, nous n’avons
ni fourrure pour nous chauffer en hiver, ni griffes.

Contrairement à nous, tous les animaux sont dotés de compétences pour survivre dans la nature. Finalement, j’ai changé d’avis. En effet l’homme ne fut pas toujours fragile. Nous le sommes devenus avec l’évolution. Nous avons fait des machines, nous nous sommes adaptés à la nature, à notre façon. Nous avons également évolué en communication. Le mot communication vient de Communicare en langue latine. Communicare veut dire “partager”. Depuis notre création, nous avons développé de nombreuses méthodes de communication verbale et non-verbale.

Je voudrais parler un peu de l’évolution de la communication car je suis Graphiste, donc la communication me concerne.
Ce qui m’intéresse le plus est l’époque avant la communication numérique parce que je trouve que les méthodes de communication de cette époque sont plus sentimentales. J’expliquerai cet aspect plus en détails par la suite.
En communication chaque nouveauté est une menace pour les anciennes manières de communiquer, elle a tendance à les mettre à l’écart voire à les oublier. Par exemple, en 1928, la Turquie change son alphabet Arabe en Latin (la langue officielle reste le Turc). C’est une des meilleures avancées de la Turquie. En revanche, le changement de l’alphabet a entraîné des pertes culturelles importantes puisque la génération suivante était incapable de lire la littérature Ottoman à moins que celle-ci soit réécrite avec l’alphabet Latin. De plus, quand les ordinateurs sont arrivés, la plupart des messages écrits tels que les lettres, laissent leur place aux données numériques. Avec le temps, les formes de communication anciennes meurent, y compris la radio. Ma mère m’a souvent parlé des séries à la Radio. Aujourd’hui, il n’y en a presque plus. Dans nos albums de famille, il y a des cartes postales et des lettres. Pour ma part, je n’ai jamais reçu de lettres de quelqu’un. Cependant, J’essaie de garder en mémoire le passé en conservant les cartes postales que j’ai pu recevoir.

Je trouve que les cartes postales sont une manière très unique de communiquer. Bien qu’elle présente des similarités avec la lettre écrite en matière de communication, ce n’est pas la même chose. La quantité d’informations écrites sur une carte postale est moins importante que sur une lettre.
Contrairement à une lettre, une carte postale a des informations visuelles. Les gens qui sont à l’étranger quand ils envoient la carte postale choisissent le plus souvent une carte postale avec l’image de la ville qu’ils visitent.

La propriété visuelle de la carte postale engage la mémoire visuelle des gens. De plus, le choix de l’imagerie représente
le goût et également le sens que l’expéditeur souhaite donner à cette carte postale. Sauf quelques exceptions, nous envoyons en général des cartes postales aux gens que nous aimons.
La personne qui tient une carte postale, tient l’amour dans
sa main. Garder les cartes postales du passé veut dire garder
les sentiments sous une forme solide. Même si la personne qui
a envoyé cette carte postale ne nous aime plus, l’amour du passé est là, dans la carte postale. C’est en quelque sorte une façon de collectionner l’amour du temps qui passe.

La plus vieille carte postale dont nous avons connaissance a été envoyée en 1840 par Theodore Hook, un écrivain de Londres. Elle était peinte à la main et avait un timbre noir. On présume qu’il l’a envoyée à lui-même pour faire une blague au service postal. Le dessin était une caricature des employés du service postal. La première carte postale fut imprimée en France en 1870 par Léon Besnardeau à Camp Conlie. Pendant la guerre Franco-prussienne, Conlie est un camp d’entraînement.
Il y avait les blasons du Duché de Bretagne de chaque côté de
la carte postale. L’année suivante, la première carte postale avec une image qui fonctionne comme un souvenir était envoyée de Vienne. Le nombre de cartes postales avec images a augmenté dans les années 1880, grâce à la construction de la Tour Eiffel. Cette époque était l’âge d’or de la carte postale. Les premières cartes postales avaient souvent des images de femmes nues.
Ce type de carte postale est mieux connu sous le nom de “carte postale Française” parce que la majorité de ces cartes postales ont été produites en France(2).

L’un des artistes les plus intéressants que j’ai découvert pendant mes recherches en écrivant ce mémoire est l’artiste conceptuel japonais On Kawara. On Kawara a vécu entre 1932 – 2014. Le travail d’On Kawara a beaucoup d’influence sur l’existentialisme et il avait une obsession sur le temps qui passe. Sa façon d’enregistrer son existence dans le temps est très inspirante. On Kawara, sur son projet qui s’appelle “Je me suis réveillé” a envoyé de nombreuses cartes postales (environ 1500) entre 1968 et 1989. Les personnes qui reçoivent les cartes postales inclus certaines personnes d’art connues telles que Sol LeWitt, Lucy Lippard et Kasper König. Chaque carte postale portait le message “Je me suis réveillé” et l’heure à laquelle il s’était réveillé. Le message a été estampillé (non manuscrite). Il envoyait deux cartes postales de son emplacement.
On Kawara voyageait souvent. Sur les 1500 cartes, il y a l’heure à laquelle il s’est levé, la date et le lieu de résidence de l’artiste. C’est une façon pour un artiste de suivre le temps et son existence(3).

La Deltiologie est l’étude et la collection des cartes postales.
Ce terme a été trouvé par le Professeur Randall Rhodes en 1945. Il y a quelques indications qui nous permettent de savoir l’époque d’une carte postale. Habituellement les cartes postales sont envoyées quelques années après avoir été imprimées. Les cartes postales qui sont imprimées par les entreprises ont habituellement la date d’impression d’inscrite dessus.
De plus, nous pouvons deviner l’époque en regardant l’image. La manière dont les gens sont habillés, l’aspect d’un lieu et quelques autres indications peuvent nous suggérer l’époque.
La plus grande collection de cartes postales au monde est détenue par Joe Tiberio. Les cartes postales avec images proviennent presque toutes de l’époque de l’âge d’or de la carte postale. Elles sont collectées par les bibliothèques,
les collectionneurs, les écoles, les sociétés historiques et les sociétés généalogiques. Elles sont très importantes pour la recherche parce qu’elles détiennent des informations concernant l’aspect d’un lieu à une époque particulière.
Un domaine très intéressant en matière de collection de cartes postales est la collection des cartes postales avec les images des villes – les vues réelles d’une ville, d’une région.
Les plus intéressantes de cette catégorie sont les cartes postales avec de vraies photos. Ce sont les cartes postales qui sont imprimées sur du papier photographique. Elles sont différentes des cartes postales créées sur la surface de la plaque de pression. Les cartes postales avec de vraies photos montrent des scènes réelles du passé. En revanche, la carte postale imprimée sur papier peut être modifiée par les créateurs. Elles ne montrent pas nécessairement la réalité absolue(4).

En avril 2015, une carte postale avait été trouvée dans un “message dans une bouteille” qui a 108 ans aujourd’hui. C’est le plus vieux “message dans une bouteille” jamais découvert. Ironiquement, la bouteille avait été trouvée par un employé retiré du service postal. Ce sont 1020 bouteilles qui sont jetées à la mer entre 1904 et 1906 par l’association de biologiques marines en Angleterre. Les bouteilles furent jetées dans la mer du nord. Elles y étaient jetées pour prouver une recherche sur les directions du courant de la mer. Sur la carte postale, il était demandé en trois langues (Anglais, Allemand et hollandais) de la renvoyer à l’association de biologiques marines(5).
Nous ne savons pas voyager dans le temps mais nous pouvons envoyer des messages à l’avenir. Un “message dans une bouteille” est une manière de communiquer avec le futur. Les bouteilles habituellement se perdent dans l’océan. Des années plus tard, elles peuvent être trouvées.
Elles contiennent des informations de personnes d’une autre ligne du temps. C’est une des plus jolies découvertes qu’une personne peut faire. Le premier “message dans une bouteille” dont on a eu connaissance fut laissé en 310 av .J.-C. par Theophrastus, un philosophe grec classique. Il voulait faire une expérience pour montrer que la mer Méditerranée a été formée par l’Océan Atlantique.(6)

La différence entre la poste, les messages dans une bouteille, les écrits gravés dans la pierre et la communication actuelle (messagerie instantanée, texto et appel téléphonique) est que la communication instantanée ne donne pas beaucoup d’informations sur le temps qui passe. C’est pourquoi
la communication à long terme m’intéresse beaucoup plus que la communication instantanée. Par la communication
à long terme, nous prenons notre temps pour écrire et penser au message. On y réfléchit plus. On pense à la personne qui recevra le message. On nous occupe avec l’objet. D’une certaine manière, c’est romantique. Le destinataire a une attente. Il attend que le message arrive. Ça augmente la valeur du message. Quand elle le lit, elle lit un message du passé.
Elle peut seulement imaginer l’état actuel de cette personne selon le contenu du message. La carte postale fige ce moment présent et le transfère dans le futur. Ce type de capture du moment est non désiré, à la différence de l’art.
Les choses dont je vous ai parlées jusqu’à présent font partie de la communication objective. En revanche, l’art fait partie de la communication subjective. Pour rappel, deux raisons m’amènent à parler de la communication : premièrement, les méthodes qu’on utilise pour communiquer changent avec le temps. Deuxièmement, la communication (objective et subjective) est la mémoire du temps. L’évolution de l’art (communication subjective) est différente de l’évolution de la communication objective. En effet, la communication subjective est intemporelle. Une sculpture de 500 ans est toujours une méthode de communication efficace aujourd’hui. Les peintures le sont également. Elles peuvent nous montrer
le visage d’un Roi qui est mort depuis des siècles.

L’art est une des façons de visualiser le temps. Par exemple, l’architecture est un des domaines de l’art et pourtant, quand j’étais plus jeune, je me suis demandé si l’architecture pouvait être un art ou pas. Finalement, j’ai décidé que “oui”. Je crois que si une structure porte une influence artistique forte, soutenue par une idée puissante et esthétique, elle peut devenir de l’art. Comme j’en ai parlé avant, les civilisations anciennes avaient aussi leurs visions du temps et elles l’ont exprimée par la communication subjective. Par exemple, les Mayas ont exprimé leurs perceptions du temps par leurs immenses structures(7). J’en expliquerai plus précisément la manière dont elles ont été réalisées dans la partie qui suit.

Chez les Mayas, le temps est symbolisé par les architectures. Chichen Itza est une ville Maya située au Mexique. Chi signifie “bouche” chén veut dire “puits” et Itza, “sorcière de l’eau” (8). Itza est le nom d’un groupe ethnique. Aujourd’hui, ils existent encore. Ils parlent Espagnol et Itza. Ils habitent au Guatemala. El Castillo aka “Temple de Kukulcan” est situé au centre de Chichen Itza. C’est un site de pyramides Mésoaméricain. Toutes les caractéristiques de cette structure font référence au temps. Il y a 91 marches sur la structure et la structure à quatre côtés. Donc, 4 fois 91 font 364 auxquelles, on ajoute une marche au sommet, ce qui fait 365, le nombre de jours dans une année(7). La structure représente visuellement le temps qui passe. Une caractéristique fascinante de cette structure est que deux fois par an, une ombre qui ressemblait à un serpent arrivait sur El Castillo. Pendant le coucher du soleil, l’ombre du serpent descendait l’escalier en se tortillant et rejoignait la tête du serpent au pied de la structure. Une autre structure impressionnante avec des caractéristiques du temps est
“Le temple des inscriptions”. La structure compte cinq entrées. Sur chaque entrée, il y a des textes hiéroglyphiques écrits en langue Maya. Les écrits disent que “le temps se répète, les événements du passé se reproduisent encore et encore” (9).
Il en ressort de ce texte beaucoup de sagesse. Si nous examinons l’histoire du monde, nous pouvons voir que toutes les choses qui sont arrivées, toutes les guerres, tous les changements continentaux, les politiques et même les questions sociales
se répètent continuellement.

Les mayas étaient obsédés par le temps. Ils cherchaient des méthodes pour mesurer le temps. Ils n’avaient pas d’horloges, donc ils utilisaient leur environnement pour le mesurer.
Les Mayas avaient leur propre calendrier. Leur calendrier est formé de trois calendriers séparés Haab, le compte long et Tzolkin). Ils sont utilisés simultanément. Les jours sont identifiés par Haab et Tzolkin. Haab montre 365 jours selon le soleil. Il y a 19 mois. Il y a 18 mois de 20 jours chacun et il y a un mois de 5 jours. Il a un anneau extérieur avec des hiéroglyphes mayas qui représentent chaque mois. Chaque hiéroglyphe est associé à un personnage. Tzolkin a 260 jours qui correspondent au temps de la grossesse. Il y a 20 périodes de 13 jours pour les événements religieux et les cérémonies. Les jours sont numérotés de 1 à 13. Il y a 20 hiéroglyphes qui correspondent à des noms de jours. La troisième partie, “le compte long” mesure les périodes du temps plus longues. C’est un calendrier astronomique. Il mesure ce que les mayas appelaient “le cycle universel”. Chaque cycle a 2.880.000 jours(10). Les mayas croyaient qu’au début de chaque cycle, l’univers était détruit et ensuite recréé (11).
Les mayas ont inventé le calendrier le plus vaste et le plus précis de toute l’humanité (12). Ils suivaient les mouvements du soleil, de la lune et de la planète Venus etc… pour créer des calendriers complexes mais de grande précision. Ils ont pris conscience des cycles de la nature, des planètes et de leur propre corps et ils les ont utilisés pour mesurer le temps. Ils ont réussi à dater le passé lointain et l’avenir et ils l’ont fait sans utiliser de technologie. Les Mayas acceptaient la théorie que le passé, le présent et le futur existent ensemble(12). Comme une voiture de course qui fait des tours dans un circuit, le futur et le passé (la route) revenait toujours au début (le présent). Les mayas utilisaient au total 17 calendriers différents. Après des années de recherches, Jose Argues a découvert que “la supériorité scientifique et la sophistication galactique des calendriers mayas sont dues au fait qu’ils s’étaient basés sur un système de mesure et un système mathématique très différent des systèmes et dispositifs de comptabilisation du temps que nous connaissons ou utilisons dans le monde actuel”(12).

Les Mayas n’ont pas seulement mesuré le temps. Ils croyaient également qu’ils devaient aider le temps à passer. Ils pensaient que le temps créait l’espace. Ils utilisaient le calendrier solaire et les mouvements du soleil permettaient de mesurer le temps qui passe. Ils croyaient qu’ils étaient obligés de nourrir le soleil pour l’aider à passer à travers le ciel(7). Ils faisaient des sacrifices humains en pensant nourrir le soleil de leur sang.
Les différentes cultures et religions ont des points de vue divergents sur le temps. Dans le premier livre de
la Bible hébraïque qui s’appelle “Genesis”, il est écrit :
“Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. La terre était informe et vide, les ténèbres étaient au-dessus de l’abîme et le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux. Dieu dit : Que la lumière soit. Et la lumière fut” (13). Donc dans la religion Juive, le temps n’est pas éternel. Avant la création, le temps n’existait pas. Par contre, dans l’Islam, c’est le contraire. Dans le coran,il est écrit : “Il ne donne pas naissance, et n’a pas été enfanté”.
Cela veut dire que Dieu n’a pas une existence qui peut être mesurée par le temps. Donc, l’Islam nous dit que la notion de temps est non-existante en métaphysique. C’est le cas aussi pour les Bouddhistes. Dans la croyance bouddhiste, il n’y a ni début ni fin du temps. Le temps est éternel et la temporalité est une illusion. On peut dire qu’il est relativiste. Cependant, nous les humains ne pouvons pas imaginer une vie sans le temps du fait que dans notre monde, l’existence est basée sur le temps. L’éternité divine et le temps ne sont pas les mêmes.
Par exemple, la phrase : “Le dieu a créé le temps” est incohérente. Si dieu avait créé le temps, cela voudrait dire que le temps n’existait pas à sa création or ceci ne peut pas être, Dieu ne serait pas un sujet de la notion du temps. Un objet de la vie qui n’existe pas (encore), par exemple un arbre, peut venir à exister seulement après avoir passé un certain temps. Un arbre naît. Nous regardons cela de cette manière parce que nous acceptons les objets de la vie seulement de par leurs formes. Avant que l’arbre soit un arbre, il était une graine. Donc, est-ce que la graine est l’origine de l’arbre ? Avant qu’une graine devienne une graine, elle était du pollen, de l’eau et de la terre. Donc, est-ce cela qui représente l’origine de l’arbre ?
Si nous suivons ce processus de métamorphose, on peut
le suivre jusqu’à la création du monde. Mais même la création du monde ne nous dit pas quelle est son origine puisque le monde était autre chose avant d’être le monde. Donc, aujourd’hui nous ne pouvons justifier l’origine d’aucune chose et selon cet argument, le temps est éternel. Donc, que le temps a un temps et le temps du temps a un début. Cette idée est une création indispensable à notre mentalité conditionnée
au temps. Dans ce cas, il n’y a qu’une obscurité éternelle et un univers qui n’existe pas pour une place où le temps n’existe pas. C’est tellement naturel de penser comme ça étant donné que nous n’avons aucun souvenir d’avant notre naissance. Selon notre mémoire, nous n’existions pas avant notre naissance. Nous n’avons aucun souvenir ni sentiment. Puisqu’on pense
à notre vie, pour chaque individu le temps n’existe que pendant leur existence.

Puisque l’humain a conscience que le temps passe, il le mesure pour organiser sa vie. Quelle heure est-il ? Si vous voulez répondre à cette question et que vous n’avez pas de montre, vous pouvez regarder le ciel. Ce dernier est une horloge naturelle permettant d’observer le jour qui passe. Cependant,
la mesure de la longueur d’une journée à l’aide du ciel (le soleil se levant puis se couchant) n’est pas très précise.
Depuis la création du monde, la vitesse de rotation de la Terre ralentit peu à peu. Ainsi, la durée des journées devient de plus en plus longue. Aujourd’hui, nous savons que la rotation terrestre ne prend plus 24 heures.

Les scientifiques, à l’observatoire de Westford aux États-Unis, mesurent la longueur exacte de chaque jour. Ils ne comptent pas sur le soleil pour mesurer cette rotation. Grâce à deux télescopes identiques, ils mesurent les ondes radios qui viennent de l’espace et ils examinent l’instant du temps au moment où l’onde radio arrive, simultanément avec deux télescopes placés à deux endroits différents. D’abord, l’onde radio arrive aux télescopes en même temps. Ensuite, une fois que la Terre a tourné, l’onde n’arrive plus simultanément aux deux télescopes si bien qu’ils ne sont plus synchronisés. Après un tour complet, les deux télescopes sont alors de nouveau synchronisés et les scientifiques arrêtent le chronomètre. Grâce à cette méthode, ils parviennent à mesurer la durée exacte d’une rotation terrestre. On peut alors noter que les temps de rotations relevés sont tout le temps différents. Ces derniers sont aléatoires avec des rotations plus courtes ou plus longues, mais jamais d’exactement 24 heures. Les scientifiques expliquent ces changements quotidiens par l’influence du vent(7).

Si nous souhaitons mesurer le temps qui passe avec précision, il est possible de consulter l’horloge atomique. Cette dernière est l’outil le plus précis au monde. Elle utilise les atomes pour mesurer le temps. Dans l’horloge atomique, il y a un atome rare qui s’appelle le caesium. Autour de cet atome gravitent des électrons sur plusieurs orbites. Ceux-ci passent d’une orbite
à l’autre autour du noyau. Ils émettent de ce fait de la lumière. Les ondes de la lumière atteignent leur niveau maximal 9.192 631.770 fois par seconde. Ce chiffre ne change jamais(14). Nous pouvons donc dire que c’est un métronome infaillible (il ne s’arrête jamais, ne change jamais et ne se trompe jamais). C’est la raison pour laquelle l’horloge atomique est si précise.
Le temps atomique donne donc la définition exacte de
la rotation terrestre. Grâce à l’horloge atomique, le monde entier peut se synchroniser (les programmes, la navigation, communication).

Les horloges atomiques furent utilisées pour une expérience sur le temps en 1974, afin de tester la théorie de relativité d’Einstein(15). Dans l’expérience “Hafale-Keating”, deux horloges atomiques sont réglées à la même heure. Une des deux Horloges atomiques est placée dans un avion et l’autre est placée au sol. Après l’atterrissage, on récupéra les horloges et elles indiquaient des heures différentes(15). Cette expérience a prouvé qu’en changeant la vitesse d’un mouvement en trois dimensions, nous voyageons dans le temps. Chacun d’entre nous, de par son mode de vie, est plus ou moins en mouvement au quotidien. La notion de temps devient donc relative en fonction des individus.

Selon Einstein, plus nous sommes proche d’une énorme masse solide comme la Terre, plus l’espace-temps est courbé (16). Ainsi, le temps passe plus ou moins vite. A l’échelle de la Terre, cet effet est faible mais dans l’univers, il peut être plus important car il y a des planètes bien plus grosses. Elles courbent tellement l’espace-temps que le temps passe beaucoup plus vite (un an sur une de ces planètes peut être égal à 10 ans sur la Terre).Ce sujet a été utilisé dans le film de science-fiction “Interstellar”. Dans ce film, le personnage principal et son équipe sont envoyés dans l’espace afin de trouver une nouvelle planète habitable afin d’assurer la survie de l’humanité. Sur la première planète qu’ils visitent, chaque heure qu’ils vivent équivaut à 7 ans sur Terre. Pourquoi ? Parce que la planète est près d’un vortex qui s’appelle gargantua et cela provoque des anomalies de gravité sur la planète. Ça s’appelle “les effets de la dilatation gravitationnelle” (17). Ceci est dû à la théorie d’Einstein, la “Relativité Générale”. Le personnage principal
et son équipe ont passé 3-4 heures sur la planète soit 23 ans
sur Terre.

Nous vivons constamment dans le passé. Même la lumière met du temps à atteindre notre œil. Lorsque nous regardons le soleil, nous ne voyons pas à quoi il ressemble au moment où nous le regardons, nous ne voyons que le souvenir de celui-ci. Etant donné que la lumière du Soleil met huit minutes à arriver sur Terre, nous ne pouvons que voir ce à quoi il ressemblait huit minutes auparavant. Lorsque nous regardons le ciel en pleine nuit, il est possible que certaines étoiles soient mortes depuis longtemps. Nous regardons alors leur passé (18). En regardant le ciel, nous pouvons donc regarder en arrière dans le temps. Il existe une image s’appelant “le champ ultra profond”. Le télescope le plus puissant du monde, “Hubble”,
a pris en 2004 une photo de ce petit morceau de ciel la nuit. Sur cette image, nous pouvons faire un bond dans le temps de 13.2 milliards d’années(19). Nous pouvons même voir des galaxies qui n’existent plus. Imaginez qu’ils aient trouvé une planète habitable dans l’une de ces galaxies. Si nous avions un super-télescope qui pouvait voir une rue quelconque sur Terre, nous pourrions observer une vie passée.

Depuis des siècles nous avons créé une multitude de dispositifs tels que des horloges analogues, des montres digitales et des calendriers divers afin de pouvoir suivre le temps qui passe. En plus, nous avons toujours cherché différentes manières d’y parvenir. Nous avons utilisé l’art, les accumulations, des enregistrements, de la documentation, de l’architecture et d’autres méthodes. Ayant tant de possibilités, nous laissons nos traces en imprimant notre trace sur le temps qui passe tandis qu’au même moment nous accumulons pour nous-mêmes
les traces du temps afin de comprendre son passage en utilisant l’art(cité ci-dessus), les inscriptions de communication et même des actions.

Pourquoi faisons-nous ceci ? Pourquoi enregistrons-nous
le temps en employant des méthodes diverses ? L’être humain est la seule créature que nous connaissons qui est conscient que son temps est limité. Ceci crée une angoisse et une confusion dans l’esprit des gens qui les poussent à justifier leur existence à travers le temps. Le temps est précieux et compté. Le temps perdu ne reviendra pas. Dans le royaume des animaux, chaque espèce a une durée de vie limitée. Par exemple, les souris ne vivent que pendant deux ans. Elles vivent rapidement et elles meurent vite. Elles ont la capacité d’être parents seulement trois mois après leur naissance. La durée de vie d’un être humain a également une durée naturelle dans le temps.

L’être humain a cherché l’immortalité pendant des générations. Bien que nous n’ayons pas encore réussi à la trouver, certains scientifiques croient que cela est possible. L’être humain naît avec un certain nombre de cellules. Avec le temps, ces cellules meurent et diminuent en nombre.
Ces cellules ne se régénèrent pas. C’est la raison pour laquelle nous mourons(20). Mais que se passerait-il si nous pouvions gérer ces cellules ?

Une théorie dit que tout, y compris le temps, a débuté par le “Big Bang”. Donc, avant le Big Bang, la notion de temps n’existait pas(21). Un physicien sud-africain, Neil Turok, n’est pas d’accord avec cette théorie. Selon lui, si quelque chose
a engendré le Big Bang, cela signifie que le temps existait déjà(22). Pour lui, la quatrième dimension est la distance entre deux univers parallèles (23). Quand les univers parallèles entrent en collision, ils deviennent un seul et même univers qui se remplit par l’énergie de la collision. Pour lui, le temps a toujours existé. La mesure du temps est infinie. Nous divisons le temps en jours, heures, secondes, millisecondes… Ces divisions du temps ne s’arrêtent jamais. Nous continuons à nous poser cette question : Pourquoi sommes-nous constamment en mouvement vers le futur?

La théorie d’Einstein dit que le passé, le présent et l’avenir, existent tous mais simultanément(24). Le temps est la quatrième dimension(25), et nous bougeons à l’intérieur, de la même manière que nous nous déplaçons dans les trois autres dimensions physiques. C’est comme le fait de marcher ou d’aller quelque part en train. Le passé est la route que nous venons d’emprunter et il devient irréversible.
L’avenir est déjà là, il est connu d’avance. Il nous faut seulement avancer pour l’atteindre. La règle est que nous pouvons seulement aller vers l’avant.

Le Dr en physique Fay Dowker affirme que l’espace-temps est fait de petits éléments, tout comme le sable(7). Une journée qui passe n’est pas un évènement isolé mais résulte de nombreuses épreuves individuelles, les grains du temps arrivant les uns après les autres. Donc, si le temps était du sable, chaque grain serait une épreuve individuelle. Ces dernières peuvent s’accumuler au fil du temps. Cette accumulation engendre la construction de notre univers, comme indiqué précédemment. Ainsi, la somme de toutes ces épreuves individuelles façonne le temps. Cela signifie que l’avenir n’est pas décidé à l’avance. Il évolue à mesure que nous poursuivons notre vie. Cette théorie se rapproche plus du thème de mon mémoire.

Nous faisons des choix immuables lors de notre vie. Ils sont immuables parce qu’on ne peut pas revenir en arrière. Cependant, parmi toutes les décisions que nous prenons, toutes ne sont pas irréversibles. Il y a en effet des choix sur lesquels nous pouvons revenir à maintes reprises. Ceux pour lesquels ce n’est pas possible peuvent engendrer des moments critiques. Puisque le temps ne nous permet pas de les changer, nos vies suivent la ligne de nos choix antérieurs. Une seule décision peut alors avoir une influence sur la suite de notre vie.

Par exemple, si on prend une personne qui doit choisir entre deux voies professionnelles distinctes, son choix aura des répercussions sur toute sa vie. En effet, il sera alors plus susceptible de rencontrer une femme plutôt qu’une autre. Il fondra ensuite une famille avec comme point de départ son choix professionnel, ce qui aura une influence sur ses descendants et plus largement, sur un nombre important d’individus dans les générations à venir. Le choix de départ est donc primordial pour la personne concernée mais également, au fil du temps, pour un nombre exponentiel de personnes.

Un jour, une jeune femme rencontre un jeune homme et quelques années après ils se marient. J’aime saisir le moment quelques minutes avant leur rencontre. Il est dans un appartement à discuter avec ses amis sans s’imaginer un instant ce qui va se passer, sans savoir qui va arriver. La jeune femme pendant qu’elle monte l’escalier ne peut pas deviner qu’à chaque pas qu’elle fait elle s’approche du moment qui va chambouler à tout jamais sa vie. C’est le moment magique. J‘imagine ce moment de nouveau en créant un rêve dans mon esprit car je savais pendant ce court instant ce qui les attendait tous les deux. Le temps qui passe exige non seulement des choix mais également l’intervention d’autres gens qui vont agir sur l’histoire de notre vie. En plus, ces rencontres vont changer l’histoire des deux parties.

Le photographe Alec Soth, a travaillé sur un projet : “comment les couples se sont rencontrés ? (26)”. Avec Stacy Baker qui lui a proposé de se joindre à des recherches sur ce sujet, ils se sont rendus dans une maison de retraite afin de prendre en photo des couples mariés, d’écouter leur histoire, regarder leurs photographies de mariage. Le but de ce projet était d’explorer pourquoi certains couples restent ensemble malgré le temps qui passe et voir comment se présente l’amour qui perdure. Une des histoires concernait Mary et Georges. Ils se sont rencontrés dans un club de “country western” nommé “Sahara” dans le Kentucky. Quand ils se sont rencontrés Georges était alcoolique. Il buvait 54 bières par jour. Il avait des dettes avoisinant les $9000. L’année suivante Mary lui proposait de l’aider à payer cette dette et a tenu sa promesse. Pendant leur mariage, une fois, quand il était ivre il a menacé de tuer Mary et ses deux enfants mais Mary et les deux enfants se sont échappés et le “swat team” est venu à la maison. Cependant Mary l’a repris et au fil du temps les choses se sont améliorées. Georges a arrêté de boire, il n’a pas touché une goutte d’alcool depuis et contre vents et marées, ils sont restés ensemble. A la fin de la journée de prise de vues, Stacy raconta à Alec que les histoires de rencontre n’étaient pas si intéressantes, en revanche ce qui était de loin passionnant était le fait qu’ils soient restés ensemble. Un autre couple qui s’appelait Joe et Rose-Anne ; comme pour tous les autres couples, on leur a demandé de montrer une vieille photo de leur mariage. Simultanément ils ont donné exactement la même photo. Deux personnes, tenant un seul souvenir, ensemble, pendant des décennies.

Notre ressenti sur le temps est que le passé s’est bel et bien produit et qu’il existe dans nos mémoires. Les expériences montrent le sentiment de soi (être conscient de sa propre existence) est nécessaire avant que les enfants ne développent la formation de leur mémoire pour des évènements qui leur sont arrivés. Donna Rose Addis, Professeur au sein de l’université d’Auckland, s’est demandé s’il existait un lien entre notre façon de nous remémorer le passé et notre façon d’imaginer le futur. Elle découvrit à travers ses recherches et ses expériences que l’activité neurale qui est employée par l’être humain lorsque nous nous remémorons le passé s’avère être relativement similaire que lorsque nous imaginons le futur(27). La raison étant que nous, humain, attachons des morceaux de notre mémoire pour nous créer une idée du futur. Cette recherche a été publiée en 2007. Plus récemment, ils ont découvert que d’imaginer le futur est un procédé beaucoup plus intensif que l’action de se le rappeler, peut-être parce qu’imaginer le futur est le fruit de nouvelles constructions mentales qui nécessitent un nouveau codage que celui existant lorsque nous nous rappelons le passé (28).

Notre passé nous donne la capacité de planifier le futur. Nous pouvons penser aux évènements passés et comment ces derniers auraient pu être différents. Cela nous permet d’entrer en réflexion en ce qui concerne nos choix futurs. Nous nous rappelons des choses auxquelles nous accordons de l’importance. C’est la mémoire qui peut également suivre la trace du temps, comme par exemple, pouvoir se rappeler à quoi ressemblait une personne lambda aujourd’hui, mais également à quoi cette personne ressemblait hier. Néanmoins, le temps qui passe possède des effets négatifs sur la mémoire ; avec l’âge, la mémoire commence à décliner (29).

Nous nous soucions énormément de demain, parce que nous pensons à hier. Nous nous référons à “demain” comme le jour après aujourd’hui. Scientifiquement parlant, “demain” est
le début des prochaines 12 heures, jusqu’au 12 heures suivantes. Cependant dans notre vie sociale, nous expérimentons une légère différence. Généralement, “aujourd’hui” est défini comme notre temps d’éveil jusqu’au moment du couché. La notion de “lendemain” ne varie pas d’une personne à l’autre puisque, à la fin, tout le monde a besoin de dormir. Si nous nous retrouvons demain, nous nous retrouverons après un laps de temps défini par l’acte du sommeil ; qui nous aura fait prendre conscience qu’une nouvelle journée commence. Cependant, demain ne peut exister, car une fois que notre esprit y est arrivé, pour lui il s’agit du présent (il s’agit d’aujourd’hui et non pas de demain). Donc, philosophiquement parlant, “demain” restera toujours une partie du futur qui avance à la même vitesse et dans la même direction que “aujourd’hui”, et que nous ne pourrons jamais atteindre. C’est ce qui rend “demain” vraiment intéressant car c’est un temps dans un temps. “Demain” en tant que mot est abstrait. En terme de temps, Demain ne peut pas être défini spécifiquement et ce car il n’y a jamais qu’un seul demain. A la place, il serait plus juste de dire que chaque jour suivant est un Demain. Demain possède un nombre infini de débuts et de fins qui s’empilent sans fin pour créer les jours, les mois, les années, les siècles etc. A chaque jour il y aura un demain, et chaque journée a été le demain d’un jour précédent. Cette transformation est le résultat naturel du concept
du temps.
Imaginons un endroit où il n’existerait aucun Demain, mais où tous les jours sont les mêmes. Tous les “demain” et les “hier” sont “aujourd’hui”. Le temps ne s’est pas arrêté, et nous ne sommes pas non plus en train de voyager dans le temps. Le temps ne fait que se répéter comme une boucle. Dans cet endroit, vous vous couchez tous les jours pour vous réveiller le même jour. Dans cet endroit, une personne pourrait faire l’expérience de l’existence de différentes chronologies journalières en faisant différents choix chaque jour et il pourrait observer la séparation des différentes chronologies découlant des interactions humaines. Dans Un jour sans fin, l’acteur Bill Murray qui joue le rôle d’un journaliste, a été envoyé dans une petite ville afin de faire le portrait de la fête locale : “le jour de la marmotte” (The Groundhog Day), jour qui semble être pris dans une boucle temporelle qui se répète encore et encore. Le personnage de Bill Murray, est la seule personne capable de prendre conscience de ce phénomène, que chaque jour vécu dans cette ville est une répétition du jour précédent. Chaque jour, il essaie quelque chose de différent. Il s’intéresse évidement à une fille et emprunte chaque jour des voies différentes pour essayer de gagner son cœur. Aucune importance s’il échoue, car le temps forme une boucle dans cette ville, la journée recommencera et il essaiera de nouveau une nouvelle façon pour conquérir son cœur.

Aujourd’hui, dans notre monde la plus grosse partie de la population vie malheureusement chaque jour comme si tous les autres jours étaient les mêmes. Cependant, à la différence du personnage dans le film, il n’existe aucune seconde chance. Nos civilisations sont basées sur une simple routine. Beaucoup d’entre nous gaspille notre précieux temps en allant travailler et en revenant à la maison. Répétant ces actions cinq jours par semaine. Prenant des vacances une fois par an dans un hôtel de classe moyenne, finissant notre existence à la retraite peu de temps avant l’heure du jugement dernier. Les touristes que j’ai pu voir pendant mes 25 premières années à Istanbul, étaient soit très vieux, soit très jeunes. Je ne me rappelle pas avoir vu beaucoup de 30/50 ans.

La folie de la surconsommation résultant de la surproduction, n’a pas seulement volé du temps à notre planète, mais également le nôtre. Nous vivons tellement vite mais tellement bas, nous en oublions que le temps est notre atout le plus important. Un homme avec plus de temps est un homme plus riche qu’un homme avec beaucoup d’argent. Nous aurons toujours une chance de gagner de l’argent mais nous n’avons jamais eu la chance de gagner du temps. Au lieu de courir partout, au lieu de toujours essayer d’être quelque part à une heure précise, cela rendrait la vie tellement plus plaisante de ne pas s’en faire. Comme la chanson intitulée “Out of Time” du groupe Blur nous le dit : “You’ve been so busy lately that you haven’t find the time to open up your mind and watch the world spinning gently out of time” (Tu as été tellement occupé dernièrement que tu n’as pas trouvé le temps d’ouvrir ton esprit et de regarder le monde tourner gentiment hors du temps).

Peu importe ce que tu fais, le temps continuera sa course, les scientifiques, les artistes, les philosophes, les civilisations ; au moins une fois dans leur vie, ils ont eu l’idée de se poser la question : qu’est-ce que le temps ? Pour que le passage du temps ait un sens, je pense qu’il est important d’être capable de le voir de différents points de vue. La réponse à la question “qu’est-ce que le temps ?” dépend de qui pose la question et à qui il pose cette question. Avoir une idée de la définition du temps qui passe est important car je pense qu’être socialement conscient de ce mouvement temporel, ajoute énormément de caractéristiques humaines et accroît la qualité de nos vie. Nous sommes tous, en bout de course, que des êtres émotionnellement et spirituellement atteints par la fuite du temps. Nous sommes peut-être éternels, ou peut-être pas. Par exemple, ce que nous savons est que nous avons un temps limité. Il doit donc être utilisé avec sagesse. En ce qui concerne le temps, je n’ai aucune explication, le temps est un vaste concept sur lequel l’ensemble des vies de cet univers est bâti. La finalité de cette lecture, n’est pas la réponse à la question “Qu’est-ce que le temps ?” mais l’exploration du temps qui passe d’un point de vue plus large. A travers des recherches et mes idées personnelles, j’ai partagé avec vous la connaissance et des points de vue (les miens ou ceux d’autres personnes) relatifs au concept du temps qui passe. Tandis que mes idées sur le temps qui passe sont ma vision de ce monde, ce genre d’idée ne peut venir que de chacun d’entre vous.

Ces recherches sur le temps qui passe m’ont permis d’améliorer mes idées et connaissances sur le temps. Maintenant que je comprends mieux et que je vois le passé avec une vision plus large, je peux avoir une conjecture plus développée de mon avenir. J’ai découvert que le temps est propre à chacun. Et j’ai fini par croire que le présent n’existe pas et que le passé passe directement au futur sans transition. Je vois comment le passé forme ce que nous sommes, aujourd’hui. Nous sommes une résultante du passé. En revanche, mon inquiétude sur l’existence de la vie éternelle reste entière car pendant mes recherches, je n’ai pas trouvé de preuves tangibles à ce sujet. Finalement, je finis mon mémoire en ayant un point de vue optimiste. Nous avons besoin d’espoir pour continuer à vivre. Un des succès des croyances religieuses est de garder l’espérance dans les peuples. Croire que mon existence ne finira pas avec la mort, me permet de donner du sens à ma vie. Grâce à mes recherches, les lecteurs de ce mémoire pourront se faire leurs propres idées sur le temps.

Au final, nous avons toujours du temps pour y penser.
Qu’est-ce que le temps pour vous ?[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]